https://abouaoun.com/wp-content/uploads/2016/11/Geekondoor-1-1024×480.jpg
Introduction
Lors d’une situation de crise – c’est-à-dire tout événement qui peut ou pourrait entraîner des dommages a la population (sécurité publique, vie et/ou santé des personnes, intérêts matériels…) – les différents acteurs gouvernementaux et non-gouvernementaux sont appelés à prendre des décisions rapidement, faire appel à certaines ressources et compter sur des gens qualifiés afin de ne pas sombrer dans le chaos. Tout cela doit se faire dans le cadre d’un plan d’urgence qui a pour mission principale de prévoir les dispositions et les mesures à prendre pour gérer une situation d’urgence.
Cependant, les autorités ainsi que les différents intervenants ne sont pas tenus de préparer des plans d’urgence seulement, mais aussi des plans de prévention et de réduction de risques, qui doivent inclure des mesures prises en amont afin de limiter les dégâts humains et matériels en cas de catastrophes, et d’améliorer les aptitudes des communautés à faire face à des situations d’urgence.
Dans ce cadre, l’élément de « coordination » joue un rôle prépondérant, voire essentiel dans la mise en œuvre du plan d’urgence, avant, durant et après la catastrophe. L’efficacité et la pertinence d’un tel plan dépendent d’une bonne coordination, qui idéalement, doit être initiée et gérée par les autorités locales. Cette fonction est régie par des principes directeurs adoptés par l’Assemblée Générale des Nations Unies dans sa résolution « A/RES/46/182 » (19-12-1991) dans lesquels il est clairement indiqué que « l’aide humanitaire doit être fournie conformément aux principes d’humanité, de neutralité et d’impartialité ». Les mêmes principes stipulent que « c’est à chaque Etat qu’il incombe au premier chef de prendre soin des victimes de catastrophes naturelles et autres situations d’urgence se produisant sur son territoire. Le premier rôle revient donc à l’Etat touché dans l’initiative, l’organisation, la coordination et la mise en œuvre de l’aide humanitaire sur son territoire. »
Afin de lier les notions présentées dans cet article à un contexte réel, une hypothèse bien définie fut choisie, en l’occurrence, l’hypothèse d’un tremblement de terre dans la région de Tyr, au Liban Sud.
Description du contexte général
C’est la théorie des plaques tectoniques qui explique pourquoi le Liban est affecté par des tremblements de terre. Le Liban est traversé par une bordure de deux plaques: la plaque arabique et la plaque du Levant. Cette bordure commence dans la mer Rouge, va vers la mer Morte, traverse le Liban où on l’appelle la “faille de Yammouné” et va en Syrie ou elle prend pour nom la “faille du Ghab”, continue jusqu’au Sud de la Turquie où elle rencontre une autre faille: “la faille Est anatolienne”. “Nous avons donc une bordure de deux plaques qui a, à peu près mille km. de longueur; le Liban est à cheval sur ces deux plaques. C’est la raison pour laquelle il est, périodiquement, affecté par des tremblements de terre, tout au long de son histoire et cela va continuer.
Si les failles qui traversent le pays sont nombreuses, les sismologues sont particulièrement inquiets au sujet du système de la Mer Morte, qui sépare les plaques géantes que sont l’Afrique et l’Asie. Il s’agit de la faille la plus profonde et la plus dangereuse du Moyen-Orient, qui part de l’Ethiopie, passe par le détroit d’Aqaba, pour remonter jusqu’au sud du Liban et la vallée de la Békaa. Le Sud du Liban est classé « zones 3 & 4 » sur une échelle indiquant la fréquence et la force des séismes prévus, ce qui signifie que les secousses pourraient atteindre une magnitude de 7,5 sur l’échelle de Richter. La réponse générale au risque de tremblements de terre dans le sud du Liban fut toujours lente et/ou dispersée.
L’aspect social
Le bilan social immédiat des séismes dépend de la vulnérabilité des collectivités affectées. Si l’impact mortel initial du séisme dépend de facteurs tels que la concentration urbaine, la qualité parasismique des constructions…etc. toujours est-il que l’impact social dépend fortement du degré de la déstructuration des liens sociaux à cause du séisme. Les séismes aggravent les ruptures sociales et économiques et représentent une importante transformation du paysage social et des tissus de relations entre les gens, dont la réorganisation est fondée sur la capacité collective à créer des circuits d’entraide efficaces face aux ruptures. Un des facteurs aggravants à ce niveau est la désorganisation durable de certaines activités de la société qui s’accompagne en général d’un exode important de certaines catégories socioprofessionnelles désœuvrées.
Au delà de la satisfaction des besoins élémentaires qui représentent un enjeu vital pour des populations traumatisée, les interventions doivent prendre en compte aussi l’effort de reconnexion des réseaux sociaux. Souvent plus long à mettre en œuvre, cet effort représente une opportunité parfois mal comprise par les populations en attente. Mais c’est cet effort qui permet d’éviter l’isolement et les fractures sociales et a pour objectif de rétablir le tissu sociétal et de conserver les proximités sociales
Les acteurs dans la ou les région(s) sinistrée(s)
*Le Mohafez
*Les Caimacams des cazas affectés par la catastrophe
*Les hôpitaux de la région
*La défense civile
*La Croix Rouge Libanaise
*Le bureau régional du Ministère de la Santé
*Le bureau régional du Ministère des Affaires Sociales
*Le bureau régional du ministère des ressources hydrauliques / offices des eaux
*Le bureau régional du ministère de l’Education
*Le bureau régional de l’Electricité du Liban
*Les ingénieurs régionaux du ministère des travaux publics
*Les unités de police implantées dans les régions sinistrées ou dans leur entourage
*Les unités de l’armée stationnées dans les régions sinistrées ou dans leur entourage
*Les ONG locales et entités de la société civile opérationnelles dans les régions sinistrées
*Les ONG internationales opérationnelles dans les régions sinistrées
*Les entités humanitaires et sociales relevant des partis politiques présents dans les régions sinistrées
*La FINUL (à cause de sa présence opérationnelle dans la région tout en sachant que son mandat initial est différent)
La coordination
Dans le contexte décrit plus haut, les intervenants sont appelés à initier l’établissement d’une structure de coordination mixte (acteurs gouvernementaux et non-gouvernementaux) dans la région sinistrée, à faciliter les réunions et le travail de cette structure et de s’assurer que la coordination entre les différentes composantes demeure régulière et efficace.
Idéalement, le travail de cette structure ne doit pas se limiter à la réponse ponctuelle après la catastrophe, mais doit plutôt prévoir des mesures et un plan d’intervention avant, durant[1] et après le sinistre. C’est donc une structure de coordination mixte (qui sera appelée dans le texte « Comité de Coordination pour les Situations d’Urgence » ou CCSU) qui est proposée dans ce cadre dont les objectifs, le plan d’action et autres éléments sont décrits ci-dessous.
Eléments fondateurs
Même si le travail du CCSU est éminemment technique, cela ne dispense pas l’intervenant principal de définir et de faire adopter par les membres la base conceptuelle d’une telle initiative.
Dans ce cadre, il est important tout d’abord d’amener les membres à réfléchir et à endosser un système valoriel qui doit sous-tendre le travail du CCSU. En voici quelques valeurs de base :
Le respect des droits de l’Homme (cela est d’autant pertinent que durant les situations d’urgence, les acteurs gouvernementaux ou autres forces de facto ont tendance à négliger ou oublier cet aspect) · La non-discrimination entre les différentes composantes des communautés affectées par la catastrophe · L’adoption des normes internationales applicables (SPHERE…etc.) · Transparence et dissémination régulière d’informations précises et objectives · Encourager la participation des communautés affectées dans la planification, l’exécution et l’évaluation des mesures de prévention et de réponse Partant de cette base, l’objectif global du CCSU est de limiter, à travers un « plan de coordination en situation d’urgence » (PCSU), les dégâts humains et matériels tout en maintenant l’ordre et la sécurité publics.
Les objectifs spécifiques sont définis comme suit :
Etablir une dynamique de coordination entre tous les acteurs concernés par les différentes étapes (avant, durant et après) · Identifier les ressources nécessaires pour l’application des différentes mesures et en assurer l’affectation en temps du ainsi que le suivi de leur performance et assiduité · Assurer la communication entre les membres ainsi qu’entre les membres et les autres acteurs concernés (avant, durant et après) · Collecter les informations sur les besoins (avant, durant et après) et assurer le suivi de leur mise à jour, l’analyse et leur dissémination à qui de droit.
Caractéristiques du plan de coordination en situation d’urgence
Durant la préparation du plan de coordination, il est important de prendre en considération les caractéristiques suivantes. Ainsi, un plan de coordination:Est clair, concis et facilement accessible/compris Est basé sur une analyse profonde des risques dans un contexte spécifique S’inscrit dans un cadre national qui établit les mesures de préparation, ainsi que les rôles, responsabilités et capacités des différents acteurs Inclut les différents scénarios et établit les priorités pertinentes à la région en question Inclut des indicateurs d’alerte qui peuvent être utilises afin de surveiller l’état d’avancement des risques ainsi que leur impact Reflète une compréhension des vulnérabilités ainsi que les mesures visant à les diminuer en amont.
Inclut des objectifs et des résultats réalistes et mesurables, ainsi que des protocoles et procédures d’activation et d’exécution Inclut une analyse des ressources disponibles menant à l’identification des ressources qui manquent ainsi qu’un plan d’action pour les assurer en externe. Génère un ensemble de taches que chaque acteur est tenu à adopter au sein de son institution/département Adopte une approche centrée sur les ressources locales Inclut un processus d’échange et de gestion d’informations Prévoit des étapes concrètes afin d’assurer la « continuité des activités » des institutions vitales Inclut un plan de formation et de développement des capacités Prend en considération les éléments de genre, de la culture locale et autres spécificités du contexte Adopte les standards internationaux applicables dans ce genre de situation (SPHERE ou autres) Consiste en des phases complémentaires Inclut une phase ainsi qu’un mécanisme de test et un plan de monitoring et d’évaluation, assorti d’un cadre de « responsabilisation » (accountability).
H- Note finale L
efficacité des interventions en situations d’urgence est optimisée quand la synergie entre les acteurs au niveau central et ceux au niveau régional/local est bien préparée à l’avance. Il est important de noter dans ce cadre que tout plan de coordination doit rester « dynamique » et non « statique », impliquant donc un processus de remise à jour continue ainsi qu’une flexibilité permettant une adaptation rapide au contexte de l’urgence.
S’il est vrai qu’il n’y a pas de modèle « magique » ou « idéal », toujours est-il que les aspects les plus courants ou un apport des autorités centrales est pertinent sont en général l’adoption d’une stratégie nationale, le support technique, les ressources (allocation d’un budget), l’établissement du cadre légal et institutionnel pour ces structures de coordination…etc. Ainsi, les autorités régionales/locales doivent être soutenues afin de développer des stratégies, politiques, plans et procédures afin de prendre en charge les situations d’urgence.
A cette fin, une analyse profonde des capacités des acteurs aux niveaux local et régional doit être faite au préalable afin de dégager un plan de renforcement des capacités dont l’exécution est condition sine qua none de la réussite de toute intervention en cas d’urgence. Ce plan ne doit pas se limiter à des formations techniques seulement. Il serait utile d’y inclure des stages, des voyages d’études, du coaching, des manœuvres, des simulations, production d’outils et de ressources…etc. D’autre part, il ne faut pas négliger la composante « communautaire » de ce processus. Le degré d’implication de la communauté dans l’élaboration de ce plan ainsi que les taches qui peuvent être allouées aux ressources existantes facilitent l’appropriation de la communauté, un facteur déterminant pour l’engagement de la population locale et sa contribution au plan.